mardi 10 novembre 2009

L’Invasion des profanateurs de sépultures (Invasion of the Body Snatchers) - 1956 - Don Siegel


Je passais devant ce cinéma et l’affiche m’a interpellée : une foule poursuit un couple en fuite. Et il y avait ce titre, assez extraordinaire: «L’invasion des profanateurs de sépultures» - très mauvais genre, n’est-ce pas? Très série Z avec du sang vert à bulles qui gicle partout, et des zombies extra-terrestres et des cannibales nazis.





Non, lui il est gentil.



Je n’ai jamais vu de film de série Z en réalité, mais laissez moi rêver.


Avec un goût de péché et de curiosité malsaine dans la bouche, n’écoutant que mes préjugés, je me lance à la conquête du Nouveau, et me voilà dans la salle obscure, tremblant déjà délicieusement de peur.

Le pitch: Un médecin - Miles Bennell - est admis dans le service psychiatrie d’un hôpital à San Francisco; on le croit fou mais ses confrères finissent par écouter son histoire. Tout commence par des cas isolés de personnes soupçonnant un de leurs proches d’être dépossédé de son identité. Ainsi un jeune garçon est persuadé que sa mère n’est pas vraiment sa mère, qu’elle en a seulement l’apparence. Les personnes qui doutent de leurs amis ou de membres de leur famille parlent toutes d’un manque d’émotion. Puis curieusement, ces personnes se rétractent. Miles trouve bien la situation un peu étrange, mais ne commence à s’affoler un peu que lorsqu’un corps ressemblant à celui de son ami Jack est retrouvé dans sa cave - Jack étant toujours vivant.


Scénario extraordinaire : ce film, où tout est suggéré, qui ne comporte aucun des monstres sus mentionnés, qui ne verse pas une seule goutte de sang vert (ou bulleux, ou même rouge) (sauf pour un chien écrasé par un camion, mais on n’entend que le glapissement de la pauvre bête - amis des bêtes, je soupçonne ce glapissement d’avoir été simulé en studio), qui ne comprend aucun mort - ce film, chers amis, est terrifiant. Je ne suis pas une référence en la matière, mais tout de même. Je trouve cela extraordinaire, comment l'éventualité d’être dépossédé de ses émotions, de ne plus ressentir de peine ou de joie peut être aussi horrifiant. L'acuité des sentiments en est décuplée, puisque nous sommes conscients de leur existence. La peur, la joie, la tristesse - tout est exacerbé, chez les personnages bien sûr mais aussi chez le spectateur. C’est très fin de faire un film d’épouvante (ou presque) d’un désir aussi anodin qui nous a tous traversés au moins une fois dans notre vie (ne dites pas non, je ne vous croirais pas).


Et ce qui est terrible également, c’est de ne pouvoir faire confiance à personne - puisque tous semblent atteints de ce mal étrange, ou du moins pourraient l’être. Ici, le monstre a forme humaine, et c’est lui, elle, vous peut-être?





Il en est, vous pensez?



Il y a un commentaire politique à l’oeuvre me semble-t-il - la paranoia collective dans l’Amérique des années 50, ça nous rappelle quelque chose à tous. Maintenant, je ne sais pas bien dans quel sens le réalisateur abonde: sont-ce les gens-sans-coeur qui figurent le mac carthysme? ou au contraire représentent-ils les communistes qui se sont laissés atteindre par la contagion? Ce phénomène représente-il la norme pour les gens, ou une maladie?




Je ne le sens pas, lui...



En tout cas, ce mal qui atteint ceux qui nous sont proches m’a beaucoup rappelé Shining de Kubrick, où la figure du père devient lourde de menace (je ne sais pas vous, mais un mec qui me poursuit avec une hache, ça ne me fait pas rêver).



Here is Johnny...


On pense aussi à Rhinocéros de Ionesco - puisque dans les deux oeuvres le héros se voit envahir de monstres. Et Miles figure véritablement un Béranger quand il entre en résistance.


Et le titre, vous entend-je protester. Eh bien il y a plusieurs explications:

  • le petit malin à l’origine de la trouvaille n’a pas vu le film et a traduit comme il le sentait
  • les titres de plusieurs films ont été échangés (et dans ce cas estimons-nous heureux: les Dix Commandements auraient pu s’appeler autrement, L’Invasion des profanateurs de sépultures par exemple)
  • Ce sont EUX qui ont agi pour brouiller les pistes..


10 commentaires:

  1. erzébeth, trop contente (je me répète, j'ai le droit, oh !)mardi, novembre 10, 2009

    Les seules références que je connaisse, dans ton billet, sont Monstres & Cie, et Droopy. On dirait que je ne suis pas trop prête pour ce genre de film angoissant.

    RépondreSupprimer
  2. Et moi qui croyait que c'était un truc genre "l'attaque des tomates tueuses" ou "tempête de boulettes géantes"... j'en frissonne, ce film n'est pas pour moi!

    RépondreSupprimer
  3. * Erzébeth, tu ne connais pas le Magicien d'Oz? (hihihi je suis contente d'être de retour!)

    * Mo, à l'heure du dîner, les titres que tu cites me parlent beaucoup! :) Non, mais moi non plus ce n'est pas mon genre - mais c'était sympa de voir à quoi ça ressemblait!

    RépondreSupprimer
  4. En voilà une nouvelle qu'elle est bonne! Et en plus tu commences avec un billet avec du Sissi dedans! Moi je dis, c'est parti pour un bon moment! :-)

    RépondreSupprimer
  5. * Chiffonnette, merci beaucoup! Je l'espère beaucoup!

    RépondreSupprimer
  6. pour le titre, une simple erreur de traduction je pense. Le titre original parlant de "body snatchers" et correspondant au résumé du film que tu fais.

    RépondreSupprimer
  7. (non, Céline, je suis passée à travers du "Magicien d'Oz". J'en suis la première désolée. Une enfance de fichue, voilà, encore une !)
    (tu me dis si je donne trop dans le mélodramatique, surtout)
    En réalité, je compte bien combler cette lacune dans ma vie d'adulte, ça ne peut plus durer comme ça !

    RépondreSupprimer
  8. * Anonyme, oui je pense aussi, c'est la solution la plus vraisemblable.

    * Erzébeth, mais va réparer ça tout de suite! Et non, tu ne donnes pas du tout dans le mélodramatique, c'est tout à fait justifié ici! ;)

    RépondreSupprimer
  9. Je suis teeeellement contente de te revoir parmi nous ! Je suis en retard, parce que mon ordi a rendu l'âme, mais j'ai sauté dans toute la pièce quand j'ai appris la nouvelle !!!

    RépondreSupprimer
  10. * Lilly, bienvenue dans ma nouvelle maison! je suis ravie de te voir par ici! et merci pour ton adorable mot. En tout cas, bon rétablissement à ton ordi! je me disais que ça faisait un moment que tu n'avais pas posté..

    RépondreSupprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.